22/01/2007

Violence sur les femmes et violence contre la société

Intervention à la Maison des Femmes à Rome, lors de la Journée Internationale de lutte contre la violence sur la Femme - 25 novembre 2006

En réalité, je ne suis pas engagée directement dans la lutte contre les violences faites aux femmes à l’instar de mes collègues qui sont intervenues avant moi, par contre j’ai lutté contre toutes les formes de violence auxquelles est confronté notre société et qui affectent avec une même intensité aussi bien les hommes que les femmes et notamment dans les trois dimensions qui ont été abordées dans les interventions précédentes. J’ai combattu la violence de la tyrannie et de la dictature à partir des années 80 en Syrie. Et au début des années 2000, nous sommes descendues dans les rues pour revendiquer la liberté politique et notre droit à la vie démocratique en nous confrontant à la violence, la répression et l’interdiction. J’ai mené un combat contre les violences de l’occupation et de la guerre, nous avons manifesté quotidiennement contre la violence de l’occupation sioniste et sa barbarie en Palestine, celle de l’occupation américaine en Irak et toutes les violences induites par les politiques économiques néolibérales. Durant ces diverses manifestations, nous avons observé, nous en tant que groupes de femmes démocrates, que la participation des femmes était limitée. Et lorsque il s’agit de la question de la démocratie, la pauvreté ou la faiblesse de la présence féminine est encore plus manifeste car la démocratie s’oppose précisément à la société patriarcale. Ainsi, nous avons voulu créer une association « Femmes pour la Démocratie », dont le premier objectif est de travailler pour une plus grande participation des femmes dans chacune des sphères de la vie sociale. Et notre but premier était de constituer une association qui interpelle, contrôle et fasse pression sur les associations et partis qui affirment vouloir un changement démocratique, afin de faire évoluer la participation des femmes en leur sein même et au niveau de leurs instances exécutives. Et ces expressions associatives et sociales doivent garantir les éléments et caractéristiques de la société voulue, dés maintenant afin de se réapproprier la confiance et la conviction qu’elle ne reproduira pas les mêmes problèmes prégnants du passé. Nous avons formulé la revendication suivante, à savoir que la participation des femmes aux différentes instances, de direction ou à la base devrait immédiatement atteindre les 30% afin d’atteindre au final une répartition égalitaire et légitime de l’ordre de 50%. Et nous étions également pour la discrimination positive des femmes aux élections. Dans la société patriarcale, il n’ y a pas d’autre voie que de soutenir une discrimination positive au profit des femmes pour qu’elles accèdent aux centres de décisions. Et en Syrie, le problème essentiel concerne le code de statut personnel, car il n’y a pas vraiment de discrimination en ce qui concerne la législation du travail ou de la participation électorale, en fait le problème est plus vaste que la simple question d’une égalité face à la loi. Et je vais vous présenter un exemple à partir de notre réalité : Dans le syndicat des ingénieurs, lors de l’élection d’un bureau fédéral auquel j’ai participé l’an dernier, j’étais dans une section où il y avait une proportion d’environ de 30% de femmes et il s’agissait d’établir pour le premier tour des élections une liste avec le nom de 10 personnes. Il était donc naturel que soient représentées au moins 3 femmes. Mais durant la campagne élective, nous avons constaté que les hommes les plus enthousiastes à l’idée d’une participation féminine ne mettaient qu’un seul nom de femme. Les autres quant à eux composaient des listes exclusivement masculines. Plusieurs femmes s’étaient présentées mais la conviction qu’une dispersion des voix sur les candidates risquant au final d’aboutir à l’échec pour toutes, nous a fait décider de présenter seulement trois noms. Et Finalement j’ai du me retirer pour au moins préserver la possibilité qu’au moins une seule d’entre nous puisse être élue Et c’est ce qui s’est finalement passé, une seule d’entre nous a été élue. Et dans de nombreuses autres unions locales, pas une seule femme n’a réussi à passer. Et si nous avions un quota de 30% pour chaque élection, beaucoup d’autres femmes se seraient présentées car certaines ont la possibilité d’êtres élues. Et sans cela, la société patriarcale continuera à s’auto reproduire. Nous avons lancé notre association durant le printemps de cette année. Mais il semblerait que les autorités en Syrie ne veulent pas que nous puissions contrôler la participation des femmes. Et comme toute activité indépendante est interdite, ils ont promulgué des ordres interdisant aux fondatrices de se déplacer. Et notre activité s’est arrêtée à son début. J’étais par hasard à l’extérieur de la Syrie quand l’ordre m’interdisant de voyager a été décidé. Ceci confirme la nécessité de notre lutte contre toutes les formes de violence. Et que nous participions aux décisions qui déterminent nos vies. Nous devons participer au changement de la société. Nous devons arriver aux centres de décision. Et quant à la violence faite aux femmes, elle ne reculera pas tant que nous n’aurons pas la possibilité d’accéder aux fonctions qui nous permettraient d’amender les lois ou d’en promulguer de nouvelles dont l’objet serait de combattre toutes les formes de violences. Comme il est par ailleurs indispensable d’être présent dans les centres de contrôle, de règlements des contentieux juridiques et de la justice jusqu’à constituer une force incontournable et effective sur les questions de la violence faites aux femmes.
Nahed Badawia

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